Private Equity : Diversifier son patrimoine au-delà des marchés cotés

Dans un contexte économique en perpétuelle mutation, les investisseurs cherchent de plus en plus à diversifier leurs placements au-delà des marchés cotés. Parmi les solutions à considérer, le Private Equity ou encore appelé « Capital-Investissement » occupe une place à part. Il permet d’investir dans des entreprises non cotées, souvent prometteuses, et de participer directement à leur croissance. Mais cette opportunité s’accompagne de contraintes, de frais spécifiques et d’un horizon long qu’il faut bien comprendre avant d’agir.

Cet article propose de faire le point, de manière claire et objective, sur le rôle que peut jouer le private equity dans une stratégie patrimoniale équilibrée.

Comprendre le Private Equity : une logique de création de valeur à long terme

Le private equity consiste à prendre des participations dans des entreprises non cotées à différents stades de leur développement : amorçage, croissance, transmission ou redressement. Contrairement aux marchés boursiers, il ne s’agit pas de parier sur les fluctuations de cours mais d’accompagner la création de valeur opérationnelle au sein d’entreprises réelles sur une période souvent longue de 7 à 10 ans.

L’investisseur en private equity ne finance pas une action abstraite : il soutient une entreprise, une stratégie, une équipe. Cette implication plus directe justifie en partie la prime d’illiquidité, c’est-à-dire le rendement supplémentaire attendu par l’investisseur en contrepartie du fait que son argent restera bloqué pendant plusieurs années et qu’il ne pourra pas le récupérer facilement comme sur un marché coté. Cette prime reflète donc le coût de la patience et le risque supplémentaire lié à l’absence de liquidité.

Cependant, il est essentiel de préciser que cette prime n’est pas automatique : elle n’est réellement captée que par les gérants les plus performants, souvent qualifiés de gérants du premier quartile, c’est-à-dire ceux dont les fonds se situent dans les 25% de performances les plus élevées de l’univers du private equity. Pour les fonds médians ou mal sélectionnés, les frais élevés et la dispersion des résultats peuvent effacer cette surperformance par rapport aux marchés cotés.

En d’autres termes, le private equity ne garantit pas de meilleurs rendements, mais il offre une opportunité de performance différenciée à condition d’être sélectif, patient et bien accompagné.

Pourquoi intégrer le private equity dans une stratégie patrimoniale ?

Le private equity attire de plus en plus d’investisseurs fortunés ou avertis car il répond à plusieurs objectifs structurants.
D’abord, il constitue une source de diversification. Sa performance est faiblement corrélée à celle des marchés boursiers ce qui permet d’amortir les fluctuations du portefeuille global. Ensuite, il offre un potentiel de rendement supérieur dans la durée en contrepartie de son illiquidité.

Au-delà des chiffres, investir dans le non coté permet de soutenir l’économie réelle : accompagner des entreprises locales, participer à l’innovation ou à la transmission du tissu économique français. C’est aussi une manière de donner du sens à son patrimoine en le connectant à des projets entrepreneuriaux concrets.

Enfin, dans une logique patrimoniale globale, le private equity peut être perçu comme une brique satellite autour d’un cœur d’actifs plus classiques (immobilier, actions, obligations). Cette position permet d’améliorer le couple rendement/risque du portefeuille, c’est-à-dire le compromis entre la performance attendue et la volatilité ou l’incertitude des résultats. Concrètement, en combinant des actifs plus liquides et stables avec des investissements non cotés plus rémunérateurs mais illiquides, l’investisseur peut espérer augmenter la performance moyenne de son patrimoine tout en limitant l’exposition aux fluctuations des marchés financiers à condition d’être patient et sélectif dans le choix des fonds.

Comment accéder concrètement au private equity ?

Il existe plusieurs portes d’entrée dans l’univers du capital-investissement, chacune avec ses spécificités et son niveau d’accessibilité.

La voie la plus répandue passe par les Fonds Professionnels de Capital-Investissement (FPCI), qui regroupent les capitaux de plusieurs investisseurs pour financer un portefeuille d’entreprises. Ces véhicules (supports) permettent de mutualiser les risques tout en donnant accès à des opportunités auparavant réservées aux institutionnels.

Certains produits, comme les FIP et FCPI, offrent une entrée plus accessible pour les particuliers, assortie d’un avantage fiscal. Toutefois, ces fonds sont souvent très concentrés sur certains secteurs ou régions et leurs performances sont historiquement hétérogènes. Leur attrait repose parfois davantage sur l’économie d’impôt que sur la performance intrinsèque.

Les investisseurs plus aguerris peuvent également se tourner vers d’autres stratégies :

  • Le secondaire consiste à racheter des parts de fonds existants auprès d’investisseurs souhaitant liquider leur position. Cela permet d’accéder à des portefeuilles déjà investis, parfois à des décotes et de réduire le temps d’attente avant de commencer à recevoir des flux de trésorerie.

  • Le co-investissement permet d’investir directement aux côtés d’un fonds dans une entreprise précise. Cette approche concentre le risque sur quelques sociétés mais réduit ou supprime les frais de gestion classiques ce qui peut améliorer le rendement net.

  • Les fonds evergreen sont des fonds à capital ouvert qui n’ont pas de durée fixe comme les FPCI classiques. Ils offrent plus de flexibilité pour investir ou désinvestir progressivement et peuvent générer des flux de rendement intermédiaires plutôt qu’attendre la liquidation du fonds.

  • La dette privée consiste à prêter directement à des entreprises non cotées, souvent en complément du capital-investissement, offrant des flux d’intérêts réguliers et une exposition différente au risque, généralement moins volatile que les prises de participation en actions.

L’important est de choisir la structure la mieux adaptée à son horizon d’investissement, à sa tolérance au risque et à sa capacité à immobiliser des capitaux sur le long terme.

La qualité du gérant : un facteur déterminant

Dans le private equity, le choix du gérant est déterminant.
La performance d’un fonds dépend bien plus du savoir-faire de son équipe que de la conjoncture économique. Un bon gérant, c’est une équipe stable, expérimentée, capable d’identifier les bons dossiers, d’accompagner activement les dirigeants et de bien gérer les sorties.

Les frais constituent également un point clé. Contrairement aux supports cotés, les fonds de private equity facturent souvent 1,5% à 2% de frais de gestion par an, auxquels s’ajoute un “carried interest”, une commission de performance équivalente à environ 20% des plus-values au-delà d’un certain seuil. Ces frais se justifient par la nature intensive du travail de sélection et d’accompagnement des entreprises mais ils exigent une réelle création de valeur pour être compensés.

L’investisseur doit donc porter une attention particulière à la transparence des frais, à l’alignement d’intérêts entre gérants et souscripteurs et à l’historique de performance sur plusieurs millésimes. C’est ici que l’accompagnement par un conseiller en gestion de patrimoine prend tout son sens.

Quelle part allouer au private equity ?

Le private equity doit rester une composante complémentaire et mesurée d’un patrimoine. Pour un investisseur averti, il est courant d’allouer entre 10% et 20% du patrimoine financier à ce type de placements, en fonction du profil de risque et du besoin de liquidité.

Une stratégie intéressante consiste à investir progressivement, année après année (on peut aussi parler de millésimes), plutôt que de placer un montant unique à un instant donné. Cela permet de réduire le risque lié aux cycles économiques et d’étaler les appels de capitaux, c’est-à-dire les demandes de versement que le fonds fait aux investisseurs au fur et à mesure qu’il trouve des entreprises à financer (on appel cela : lisser le risque). On ne met donc pas l’argent sur la table immédiatement mais on s’engage à le verser petit à petit quand le fonds en a besoin.

Dans tous les cas, cette allocation doit être pensée comme un budget régulier plutôt qu’un placement ponctuel : on alimente progressivement sa part de private equity tout en conservant une réserve d’argent liquide suffisante pour faire face aux imprévus et répondre aux appels de capitaux sans stress.

Les risques et les précautions à ne pas négliger

Investir en private equity implique d’accepter plusieurs contraintes structurelles.

La première, c’est l’illiquidité : une fois investi, le capital reste immobilisé jusqu’à la cession des participations, souvent plusieurs années plus tard. Cette contrainte est la contrepartie directe du potentiel de rendement supérieur.

La seconde est la volatilité masquée. Contrairement aux marchés cotés, les valorisations ne sont pas quotidiennes. Cela donne une impression de stabilité mais ne signifie pas que le risque économique a disparu. Les entreprises non cotées subissent elles aussi les cycles macroéconomiques. Simplement, ces variations ne sont pas visibles au jour le jour.

Enfin, la dispersion des performances est très élevée dans cet univers. Entre un gérant du premier quartile et un gérant moyen, les écarts de rendement peuvent aller du simple au triple. D’où l’importance cruciale de la sélection et de la diversification des fonds et des millésimes.

L’investisseur averti doit aussi intégrer les frais plus élevés et la planification de trésorerie nécessaire pour répondre aux appels de fonds (capital calls). En résumé, le private equity exige rigueur, horizon long et discipline d’exécution.

Un exemple concret d’intégration dans un patrimoine

Prenons le cas d’un investisseur disposant d’un patrimoine financier de 2 millions d’euros, avec un horizon d’investissement d’une quinzaine d’années.

Il pourrait allouer 10%, soit 200 000€, à des véhicules de private equity, répartis sur trois années successives pour lisser le risque (environ 65 000€ par an). Une partie via un fonds diversifié (FPCI), une autre via un fonds secondaire pour accélérer la mise en œuvre et éventuellement une ligne de co-investissement plus ciblée.

Le reste du patrimoine resterait investi dans des actifs plus liquides, comme les actions ou les obligations, ou dans des actifs immobiliers sélectionnés pour leur rendement et leur horizon long terme, afin de conserver à la fois une marge de manœuvre et un équilibre entre liquidité et performance. À terme, le rendement de cette poche non cotée dépendra avant tout de la qualité des gérants choisis et de la capacité à maintenir la stratégie dans le temps.

En résumé : un levier stratégique à manier avec exigence

Le private equity n’est ni un produit miracle, ni un simple effet de mode. C’est une classe d’actifs exigeante qui s’adresse aux investisseurs capables d’immobiliser une partie de leur capital sur le long terme dans une logique de diversification patrimoniale.

Bien sélectionné, bien calibré et intégré à une stratégie cohérente, il peut devenir un formidable levier de performance et de sens. Mais il exige discipline, patience et discernement.
Investir dans le non coté, c’est accepter de renoncer à la liquidité de court terme pour viser la création de valeur à long terme à condition de s’entourer des bons partenaires et de conserver une vision globale de son patrimoine.

Cet article ne constitue pas un conseil en investissement personnalisé. Chaque situation patrimoniale étant unique, il est conseillé de vous faire accompagner par un professionnel qualifié avant toute prise de décision.